Présentation

Plasticien sculpteur, j’ai toujours eu un rapport privilégié avec les matériaux industriels ou sommaires : grillage, taule, fils de fer, filasse, terre, etc. J’en explorais sans relâche les possibilités avec de longues périodes d’observation, de manipulation, de recherches techniques et de processus, d’invention avec comme finalité la transformation du matériau initial en œuvre d’art.

C’est dans cette optique de transformation d’objets usuels que je me suis intéressé aux palettes de livraison en bois. Lorsque je détourne les palettes en essayant de limiter le plus possible les démontages excessifs et les assemblages superflus, je cherche toujours à conserver l’objet primaire afin qu’il nous délivre son propre message, son identité.

Je n’en fais pas non plus un « ready-made », expérimentant toujours de nouvelles recherches pour offrir à la palette une reconversion qui mette en valeur à la fois son passé et son présent, révèle ses qualités esthétiques d’objet usuel et industriel échoué dans le domaine de l’inutile.

Le premier rapport du spectateur à mon travail est lié à la matière, le bois, ce dernier accompagnant depuis l’aube des temps l’humanité à travers la fabrication d’outils, d’abris, de maisons, la découverte du feu et de sa chaleur apaisante… Ensuite le spectateur s’approprie le travail artistique, fait preuve de curiosité et d’intérêt pour le propos de l’artiste.

En effet, le choix de la palette est dicté par une conviction plus sociétale : transformer la palette sans la rendre complètement opaque mais juste un peu embrumée, comme une poésie urbaine. Dans quel but ? Pour qu’elle nous parle en toute discrétion de son impact sur le monde. Eco-sensible, elle nous dit le déboisement planétaire, la mondialisation des modes de transport de marchandises dont découle une uniformisation culturelle occidentalisée, la décentralisation de la production qui se répercute sur l’emploi d’une part et induit de nouvelles pollutions atmosphériques d’autre part.

Les marchandises circulent librement mais peut-on en dire autant des hommes ? La société exploite leur travail pour fabriquer des biens qui traversent les océans mais ces hommes se retrouvent trop souvent bloqués pas ces mêmes frontières, quand ils n’essaient pas de les franchir au péril de leur vie…

Lorsque je travaille la palette de livraison, objet public et populaire, reconnaissable de et par tous, je ne cherche pas simplement à démontrer qu’en travaillant à partir de déchets on développe une conduite verte du type « comment créer sans gaspiller ? » mais je laisse au spectateur la possibilité d’y lire les questionnements d’un monde en perpétuel mouvement.

Depuis deux ans, j’élargis ma démarche et investis des lieux extérieurs pour y installer des œuvres dans une logique d’harmonie avec la nature et de sensibilisation de la population.

Comme le dit Bénédicte RAMADE dans son livre « Rehab. L’art de refaire » : «les artistes cultivent la double qualité du déchet : être à la fois un matériau résolument contemporain, aux propriétés physiques ambitieuses, et un sujet parfaitement en phase avec les questions sociétales les plus urgentes ».

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